dimanche 24 mai 2009

Fiction: Chronique d'une soirée ordinaire

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Encore tôt.

Il n’aime pas les mondanités, il le sait bien, il ne peut s’y soustraire, resté cloitré chez lui ressemblerait à une mort lente, à un suicide à petite dose. Les nuits se suivent mais ne se ressemblent guère, l’ennui y ressemble étrangement avec sa morphologie à plusieurs symétries: parfois folklorique, parfois morbide, parfois glauque, parfois joyeux. Tuer l’ennui, c’est son ultime priorité dans cette parenthèse mondaine, alors que d’autres s’obstineraient inlassablement à rechercher le plaisir absolue - avec dépit finalement - comme la quête d’un graal. Lui éliminerait ces tranches d’existences nocturnes avec beaucoup de méthode, de régularité et de finesse qu’un sérial killer. Il sait ce qui peut changer la tournure, la donne d’une soirée : une femme, rien que ça. Pas n’importe laquelle. Pas celle qui vous regarde toute la soirée du coin de l’œil sans savoir trop ce qu’elle va pouvoir répondre de séduisant quand vous lui daignerez adresser la parole. Pas celle qui sait qu’elle n’a strictement aucune touche avec vous, même par pitié, puisque loin des canons de beautés esthétiques imposés par vous lecteurs et lui, et accessoirement par les magazines à papier glacé qui abrutissent les clientes des salons de coiffures, toutefois elle prend quand même le risque d’être hyper-ultra-méga gentille (quoique la gentillesse n’est plus une qualité requise chez une femme !) pour masquer ce dont elle est largement dépourvue. Sa devise à elle c’est naïvement : « qui ne tente à rien n’a rien », avec cette certitude aveugle que ca marchera toujours, il sait que dans ce genre de situation, il préfère s’abstenir de deviser avec ces filles que l’on qualifie injustement de moche, ça leur rendrait plutôt service pense-t-il non sans rire, c’est son côté mère Theresa. Il pourrait aussi être tenté par celle avec une plastique généreuse, un visage intéressant et un déhanché extrêmement lascif sur fond de salsa. Mais non, niet, nada. Lui avait besoin d’être fasciné par une beauté singulière, venue de nulle part, il aime s’infliger une certaine exigence cornélienne. Cette femme, au premier regard emballera sa soirée comme un rouleau compresseur, son existence dés lors trouvera absurdement un sens, celle de savoir qu’une femme, peut-être un peu cliché, physiquement passable, ouvertement chiante lui plairait sans chichi ni fioriture. Le lieu, un bar, connu des abonnés mondains. La faune, tout ce qui avait de quelconque pour une personne habituée des bars hype des grandes métropoles, et d’un autre côté tout ce qui avait de branché, pour un provincial, un parvenu (fils de nouveau ministre malgache par exemple) ou un jeune post-pubère, récemment adulte qui découvre le monde de la nuit avec une naïveté effrayante. Le monde de la nuit est un centre d’observation anthropologique et sociologique extraordinaire, Bourdieu y prendrait son pied. Le reflet d’une société décadente concentrée sur soixante dix mètre carré sous les lumières absorbantes de quelques projecteurs et des volutes de fumées étouffantes. Il avait particulièrement remarqué un type au physique un peu bizarre, difforme, une tarlouze vraisemblablement. Ce mec devait souvent connaître les affres de la position à quatre pattes, abonné sodomite passif, il parierait que cet invertébré serait incapable de se tenir droit comme un i. La soirée était meublée par quelques jeunes demoiselles aux visages purs et candides qui donnaient des idées impurs à certains vieux ridés occidentaux en quête d’exotisme. On n’est pas loin d’une ambiance typiquement Houellebecquienne. Puis il y a cette jeune fille, parce qu’il y a toujours une jeune fille qui vous plait dans une soirée. Jadis dans un passé très lointain, dans son extrême jeunesse, cette jeune fille aurait été cruellement inaccessible. Aujourd’hui, lui semble jouer le rôle de l’homme inaccessible, et regarde avec amusement, un jeune homme, seul avec sa demi-pinte de THB, avachi sur sa chaise, tiraillé entre l’insouciance de sa jeunesse et la tristesse d’une vie absurde, observant concupiscent, toute ses filles inaccessibles. A l'inverse de ce jeune homme, lui se pose d’autre question, plus con, plus égocentrique : pourquoi chercher à déplaire à une demi-douzaine qui s’intéresse à lui, et vouloir séduire une qui semble complètement l’ignorer ? Revenons à cette jeune fille que l’on appellera Noémie, Petula, Cassandre, Mathilde ou Fanja, un des prénoms que porteraient ces progénitures, elle lui rappelle une actrice, Bérénice Bejot dans OSS 117, son visage aux traits réguliers, mi espiègle-mi candide, des airs de midinettes des années soixante, elle figurerait bien dans un remake de Grease dans lequel il jouerait volontiers, de très jolies mains accompagnaient chacun de ses mouvements pleins de grâce absolue, rien ne lui échappait, même son doux regard rêveur qui devait penser à un autre que lui, lequel devait certainement être avec un autre qu’elle. Il savait qu’il avait tout son temps. La maturité tempère des ardeurs parfois stupides. Il évitait soigneusement de croiser ses yeux charmeurs, un jeu qui l’amusait comme un gosse, comme s’il disposait d’un troisième œil, rien ne filtrait à son regard vif, aucune démarche de séduction, pas d’approche aux motivations ambigües, juste deux, trois sourires échangés, qui valaient à elle seules de longues discussions et gesticulations inefficaces.

Très tard.

Ils partirent. Juste une phrase jetée comme un appat dans un lac possoinneux aux creux de ses oreilles. Anodin, sans conséquence sur le moment, lui sait qu’un mot dans sa plus grande légèreté peut bouleverser toute une vie.

samedi 9 mai 2009

Fiction: L'étrangère


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Dedans. Cerné, conquis, elle le surprit, Il la suivit. Une mèche rebelle soumise, un filet de larme retenu, un sourire jeté en pâture, des détails qui n’en sont plus uns. Son cœur vacille entre le trouble de la première minute et l’espoir des milles à venir. Rencontre inespérée dans un bar, elle, juste pour un verre, lui pense que ce n’est jamais pour un verre comme ce n’est jamais pour un soir. Sous des paupières espiègles miroitaient ses yeux canailles. Ses yeux, tout un programme de séduction : l’ondulation sagace de ces cils, deux jolies prunelles en forme de noisette, des sourcils noirs de jais en éventails. Dehors. Elle marcha à ses côtés, joyeuse comme une tourterelle au printemps, mutine, elle narguait sa simplicité de sa coquetterie enfantine, rieuse, tout lui semblait drôle; son cœur qui battait jusqu’à l’affolement, sa main qui tremblait presque comme une feuille morte, la rougeur naissante de ses pommettes, de sa bouche sensuelle jaillissait comme un Jeyser un rire pince-sans-rire. Ce genre de femme là, on aimerait s’en méfier, leur bonheur nous indispose, leur plaisir nous ennuie, leur gaieté nous agace et puis on finit par s’y habituer de ses exaltations dithyrambiques. Naïade empourprée, déesse des rues sauvages, sylphide de contrées exotiques, sa silhouette l’obsède. Il était un roi Perse tandis qu’elle était sa Babylone, mais ce fut elle qui le possédait, les rôles n’en finissent pas de s’inverser. Les pensées l’encombrent, elles se bousculent tel un essaim d’abeilles butineuses. Faire le tri absolument. Tout avait l’air important dans ce qu’il pensait, puisque tout le ramenait à elle. Elle prit sa main dans un élan de joie et d’enthousiasme naturelle. Une décharge de frisson électrique traversait son corps de la tête au pied, il avait lu ça quelque part dans un roman d’une mièvrerie assommante, cette histoire de frisson lors du premier contact physique. Ces mains très douces glissaient dans les siennes presque moites, et ils poursuivirent leur bout de chemin comme deux amoureux en goguettes alors qu’il s’interrogeait s’ils allaient réellement l’être. Il redoutait le moment où il allait laisser librement respirer ces doigts fins, oblongues, interminables, ces doigts d’une beauté titienne, ces doigts qui allaient peut-être parcourir son corps, peut-être des pieds à la tête cette fois-ci, des doigts fureteurs, des doigts malices, des doigts coquins et soumettre son âme à des volontés farouches et déraisonnables. Puis elle s’arrêta brusque comme une gamine capricieuse, lâcha sa main, sorti une étui à cigarette couleur chrome, pris un briquet en plastique noir, alluma une fine tige de Marlboro light, et aspira une grosse bouffée de fumée, elle était exquise, fallait la voir la gamine, il aurait voulu qu’elle le refasse ce geste, pour la beauté du geste comme seuls sont capable de le dire savoureusement les commentateurs sportifs, aussi juste pour qu’il l’immortalise en cliché noir et blanc, monochrome, à accrocher, punaiser, fixer sur le mur lézardé de sa piaule, la seule et unique fois où il mériterait de prendre en photo une femme qui le tourmentait, ce mot « tourmenter » sonner étrangement dans sa bouche, pour elle, il serait un piètre Helmut Newton, dans son cas ce serait déjà une flatterie énorme. Ce visage faussement candide, caché derrière ces volutes de fumée transparent, feignait une effronterie calculée. Il inspira longuement, courageusement repris sa main et grand ouf elle se laissa faire. Ils marchèrent à la lisière de son silence et de ses babilleries incessantes, ils étaient heureux, elle, heureuse de vivre, lui, heureux d’être juste à ses côtés, au fond il reconnaît comme par lucidité être le moins enviable. La femme se distingue de l’homme généralement à sa loquacité, elle a des idées sur tout, sa verve grandiloquente se heurtait à ses silences fascinés, il osait deux, trois mots à la hauteur de son esprit vif, tranchant, il risquait des réponses qu’il jugeait inutile mais intelligente, sans trop réfléchir, oh Dieu sait combien il avait naturellement plus de répondant, elle osa lui dire un truc du genre : « tu me fais rire… je t’aime bien …. tu es drôle », il ne sut comment le prendre, mais il le prit de telle manière à ce que leurs dialogues s’enchainent encore de manière fluide. « Où allons-nous ? » demanda-t-il très naïvement, elle lui esquissa juste un sourire qui creusait largement ses pommettes saillantes tel un immense détroit sans fin. Après quelques secondes de silences elle le fixa du regard comme si elle allait annoncer quelque chose de très important, (au fond il s’attendait à ce qu’elle lui dise quelque chose de très important pour leur sort commun !) elle avait ce regard presque grave, et qui inévitablement provoque une réaction intérieure, un chamboulement inconscient et nerveux à la personne regardée, mais disproportionnée par rapport aux propos tenus: « on va chez moi » dit-elle avec un sérieux tout empruntée. Automatiquement tel un reflexe pavlovien, des milliers de questions capitales sur ce type de situation refluèrent dans son esprit : « vais-je rester ? », « comment saurais-je si elle veuille que je reste ? », « serais-je toujours à la hauteur si je reste chez elle ? » etc. Ce « on va chez moi » décupla son tourment, et elle ne faisait rien, ne disait plus rien de plus pour le soulager, ni lui d’ailleurs, il s’est enfermé dans un mutisme stupide, en vrai abruti qu’il était. A quelques encablures de sa demeure, ruelle étroite lacérée atrocement par les stigmates des débris de solitudes, trottoirs pisseux hostiles éclairés passablement par un poteau électrique légèrement courbé, inclinaison à la tour de pise, portes barricadées sur des réalités noires, fenêtres décaties protégeant des lambeaux de vies mornes, murs survivants à l’inspiration sauvage d’artistes plaintifs, quelques corps du désespoirs allongés dans de grandes couvertures sordides - ils se sont tût depuis un laps de temps - elle désigna de son index droit son appartement ; immeuble ordinaire sur trois étages, orné exclusivement de balconnette en fer forgé. Sur le seuil d’un minuscule couloir, elle lui dit avec un sourire gêné : « merci», rien de plus, et puis quoi, à quoi pouvait-il s’attendre. Elle lui chiffonna son numéro de portable avec une précipitation désespérée sur un faux kleenex, lui déposa un baiser tendre sur la joue comme une jeune mère le ferait à son fils de quatre ans et s’engouffra avec cette démarche aérienne qui lui était propre dans un couloir très sombre. Comme dans les films il se sentait un peu con, tout seul, abandonné. Il attendait qu’elle se retourne pour voir si elle pensait qu’il la regarderait rentrer chez elle mais rien, non rien.

Son regard c’est tout ce dont il se souvient. Ce soir dans son lit, les yeux rivés sur son plafond, comme les cinq chiffres fétiches d’un parieur du PMU, tout ce dont il espérait, tenait plus qu’à dix chiffres sur un morceau de mouchoir en papier tout froissé.

vendredi 1 mai 2009

Diner Littéraire


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Au réveil ce matin, après m’être gratifié de quatre heures de sommeil paisible, je me suis dit que ce premier jour du mois de mai méritait un post qui me rendrait fier un jour d’avoir créé ce blog. Hier soir, un dîner fort convivial réunissait quelques personnes chez H. J’avoue que ce type de rassemblement simple et chaleureux entre gens de bonnes moralités, de bonnes familles et de bonnes éducations me manquaient quelque peu, c’est aussi rare que de trouver un politicien intègre à Madagascar de réunir toutes ces critères dans une seul personne et encore plus parmis toutes les personnes présentes dans une telle réunion, le seul risque redouté serait-ce sans doute l’ennui puisque nous étions les uns des autres plus ou moins formatés dans le même moule. J’ai toujours trouvé intéressant de discuter avec des gens sain de corps et d’esprit, en apparence qui semblent être dépourvu de tout inquiétude matérielle et existentielle, vivant une existence des plus enviables et finalement se posent ces mêmes questions que je n’ose même plus me poser à force de m’inventer des réponses contradictoires, celles que j’ai envie d’appeler grossièrement des « interrogations de nantis », l’indigent ne se pose pas ses questions tant qu’il a son bol de riz trois fois par jour, cela lui suffit pour être heureux, une suffisance stoïque que je m’efforce d’acquérir. Un dîner réussi c’est un dîner doté d’un bon vin (conception très française bien sûr, pas forcément partagé par mes amis malgaches). Contrairement à ce que peuvent penser la plupart des gens, l’abondance d’alcool ne garanti pas la réussite d’un repas festif ou même de toute rencontre estampillée convivial. Un dîner réussi c’est secundo une bonne assiette, un met fédérateur, un plat qui met tout le monde d’accord, d’ailleurs je commence à reconnaître à notre amphitryon un talent de chef naissant, et trés surprenant, pratiquement toutes nos conversations convergèrent inévitablement autour de la culture, une première victoire sur les conversations futiles et superficielles qui ont peuplé mon existence. Dans le contexte actuel, force est de constater que la culture reste et restera le dernier rempart contre la barbarie humaine, d’ailleurs si on pouvait faire lire le « voyage au bout de la nuit » de Céline à ces quelques militaires dénués de tout humanité, c’est rendre un grand service à notre nation. Régner par les armes, la terreur et la violence ne sert strictement à rien, les tyrans de tout espèce l’ont fort bien compris, acculturer une population c’est servir leurs propres intérêts. Tertio la qualité de la conversation est le dernier critère de réussite d’un dîner ; en effet quoi de plus réjouissant que de pouvoir deviser sur des auteurs et des livres que l’on a lu. Il est rare que je puisse avoir une réel discussion sur la littérature - dans nos contrées, c’est trivialement une distraction de l’élite bourgeoise et encore !!! - de trouver des personnes dotées de fortes cultures littéraires avec qui je puisse partager des moments forts de lectures, des émotions particulières, échanger citations et aphorismes transcendants, mais également qui puissent me porter la contradiction comme hier soir justement où des auteurs contemporains ( Houellebecque, Beigbeder…) pour lequel j’ai beaucoup d’estime ont été l’objet de critique violente ( discutable bien évidemment !!) pour des raisons stylistiques et esthétiques, sur les thèmes abordés et sur la qualité de leurs œuvres en générales. Ces critiques bien pensantes je les ai entendus et lus maintes fois, je reconnais surtout une différence réelle et caractéristique sur la perception de ce que doit être la littérature d’aujourd’hui. Et pour répondre à mon brillant et ami interlocuteur, j’estime que la littérature ne doit pas s’engoncer dans une rhétorique désuète, dans une syntaxe sophistiquée, dans un français d’académicien et pédant qui date du siècle dernier, « OK soyons snob mais pas de cette manière voyons mon cher !!», la littérature doit vivre pleinement son époque, à mon sens elle possède une vocation importante c’est celle d’ouvrir autrement le monde, ses joies et ses travers ( tel que les auteurs les perçoivent) à ceux et celles qui ont l’esprit ternis par les écueils d’une existence ordinaire et morne, comme moi finalement.